Atelier dessin – Aigues mortes 2019

Avec Claudie, tout est une question d’expérimentation et de perception exprimée par différents moyens. Des remparts sur une feuille pré-encollée avec du gros sel? Ou de la bougie pour garder la réserve blanche pour l’encre? Et pourquoi pas de la betterave pour le rosé des salins?
Et le croquis est réalisé en quelques minutes, au BIC, au fusain, avec un carré de pastel.
Nous voilà embarqué(e)s dans la croisade de trois jours, armé(e)s de nos sièges pliants, d’indispensables parapluies et de lourds sacs de matériel à dessin.

carnet de croquis et de voyage, Aiguës-Mortes

Ce que je retiens.

Il faut exprimer plus que décrire notre perception. Un rempart, des tours, c’est une masse lourde, donc des carrés, des rectangles. Peut importe si la tour se trouve à gauche où à droite. Il faut faire vite et réussir à ressentir cette masse monumentale, cette force que dégage la pierre des remparts.

Un rapide coup de carré conté pour noter ce qui semble le plus perceptible : la masse, les carrés, les courbes et les rectangles.

La ville est un étendu de toits rouges, inutile de dessiner le détail, il suffit un coup de craie et la ville est ‘notée’ dans la mémoire.

Tester les matières, les supports…

Nous expérimentons non seulement avec de la craie, du carré conté,de l’encre et un Bic, mais aussi avec de la betterave rouge! Et le papier est évidemment varié allant du blanc au bleu ou gris. Mais nous testons aussi des feuilles avec du gros sel collé et même du papier émeri…


Se préparer rapidement des fonds de pages avec des aplats de pastel, des grattages avec du papier émeri, des tâches d’encre et des matières variées est aussi une démarche intéressante.

Sur ces supports, nous prenons ensuite les ‘notes visuelles’ au BIC, au pastel, au carré conté, au feutre, au fusain, à l’encre…

Souvent debout, en marchant ou assis(es)s avant de se déplacer pour une autre vue de la ville.
Le premier jour, sous la pluie, l’exercice est difficile. Il est impossible de s’arrêter pour ‘fignoler’ un dessin. Cette contrainte nous oblige à “emmagasiner” dans notre mémoire les images et les sensations. Finalement, c’est une très bonne démarche.

J’essaie de tester différents styles : la BD, le dessin naïf sur un papier couleur, des croquis graphiques au feutre minimalistes ou encore du lavis classique à l’aquarelle. Tout n’est pas une réussite, mais au final, mon carnet de voyage est vivant et restitue bien l’ambiance de la ville et du séjour.

Le monde horizontal, les salins

Contrairement à la ville, où domine le carré et le rectangle, les salins, ce sont surtout des horizontales. C’est aussi un univers pastel avec des tonalités de bleu, du rosé et du blanc. Quelques lignes et éléments industriels éparses esquissés suffisent pour traduire le paysage. Une partie est même réalisée dans le petit train touristique qui secoue et produit ainsi un trait ‘tremblant’.

Les salins, c’est évidemment du sel, on le teste donc naturellement comme support. Ce n’est pas facile de faire du détail, mais pour restituer le paysage coloré, cela fonctionne plutôt bien.
Je teste aussi le dessin de style BD sur mon camion devant le mur du sel, bof…Il faut rester simple.

Du gros sel, la craie, un peu de l’eau pour fondre et du grattage…

De la bougie pour garder des zones blanches où l’encre n’accroche pas pour visualiser les piles de sel, qui sont un peu partout dans le paysage. Ce serait sans doute une bonne méthode pour cet univers un peu lunaire.

Découverte d’un artiste : le photographe Thierry Vezon.

C’est sans aucun doute la plus belle découverte du séjour. La méthode adoptée par le photographe Thierry Vezon pour réaliser un super reportage sur les salins sont des photos aériennes.

Elles ont été prises tout au long de l’année pour bénéficier des couleurs changeantes des paysages. Il s’agit en effet des espaces vacants, gagnés par la géométrie (nervure des canaux, dalles des salins, gerçure de terre, failles) qui produisent des aplats nets, comme pour une banquise ou le désert. Les photographier du ciel créent des tableaux fascinants.

Entre ciel et terre, édition Alcide, 2018
Les Aigues-mortes possède aussi d’intéressants lieux de culte

Une église baroque, c’est la profusion de statues et de stucs ?

Des “gribouillages” au Bic forment petit à petit la matière, la profusion et la démesure et font surgir les élément de reconnaissance pour signifier l’intérieur de l’église.

Inutile de s’attarder et faire un petit dessin besogneux. Ce qui compte, c’est restituer cette démesure de la chapelle des Pénitents gris et des pénitents blancs et son décor en stuc de plâtre (Sabatier).

Notre-Dame-des-Sablons, notre refuge contre la pluie, nous permet de saisir une toute autre ambiance.

La restauration intérieure a été réalisée de 1964-67 dans un esprit très sobre. Ensuite, l’artiste nîmois Claude Viallat y réalisa en 1991 une série de vitraux modernes qui donnent à l’édifice une luminosité particulière.

L’artiste est un tantinet répétitif, il aime les tâches d’éponge de toutes les couleurs et avec le bénitier en marbre rouge, c’est la fête des couleurs…

Disons, le style un peu enfantin, c’est tout ce qui me vient à l’esprit. cela change en tout cas de la chapelle précédente.

Pour finir, quelques réalisations qui sont des ‘cumuls de nos souvenirs’, la profusion d’impression qui mêlent ce qu’on voit, ce dont on se souvient et ce qu’on ressent…

Il ne faut pas réfléchir, paraît-il…juste gribouiller.
Lorsqu’on renverse sa bouteille de sepia.
Ah, un peu de réalisme avant le départ…

Pour conclure :

Ne pas se réfugier dans du dessin précis pour restituer ce qu’on voit avec précision. 
Dans le croquis rapide de voyage, il n’est pas possible de faire un très beau dessin qui nécessite du temps et de la construction. Ce qu’il faut, c’est évidemment d’observer, de s’imprégner du lieu, puis restituer l’ambiance par la matière, la forme, le support et la couleur et ajouter des éléments du réel pour spécifier.

Facile à dire, plus difficile de trouver toujours une idée nouvelle, et de ne pas se répéter pendant les trois jours. Comme toujours, il ne fait pas avoir peur de l’échec. Accepter d’expérimenter, donc de rater. Sinon, chacun finit dans sa zone de confort avec une seule façon de faire qui est plus satisfaisante, mais qui n’ouvre pas le champs du possible.

Et quelques souvenirs partagés de notre voyage avec l’atelier du Lunain.

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